Entrez dans l’arène de Dilouya

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Depuis le 27 Février dernier, le Dilouya’s Faithful Circus fait sa parade ! Tantôt Jazzy, tantôt Funk, parfois Pop mais toujours transpirant de Soul, l’album, résolument moderne dans son approche comme dans ses sonorités, est le premier effort du musicien et producteur parisien, Dilouya, à qui est venue prêter main forte, une ribambelle d’artistes estimés de la scène Soul/Jazz française, britannique et américaine, de Sly Johnson à N’Dea Davenport, en passant par Sandra Nkaké et Omar Lye-Fook. Entrevue…

 

Bonjour Dilouya ! Comment ça va ?Ca va très bien, et vous ma chère ?

Super, merci (rires). Ton premier album est sorti en Février dernier, combien de temps cela t’a pris pour le concevoir ?C’est un premier disque, on a mis du temps à le sortir et à le faire parce qu’il y a beaucoup d’invités et que c’est un vrai album à l’ancienne. On a tout joué, on n’a pas utilisé de machine, c’est un produit du terroir (rires). J’ai commencé à enregistrer des démos en 2008 et on a conçu le gros de l’album entre 2009 et 2010. Le projet pouvant être considéré comme “rare en France”, “risqué”, le label a gardé l’album sous le coude plus d’un an avant de le sortir.

Comment s’est fait le choix des guest ? Est-ce que tu voulais absolument ces artistes-là sur ton album ? C’était comme un jeu de dominos, je suis parti avec 3 compos sous le bras (“Runnin Away”, “The Truth”, “If I Was A Millionaire”) m’adresser aux artistes que j’aimais bien et dont j’appréciais le travail, et ces 3 titres ont amené la suite. J’ai d’abord commencé par la France, puis l’Angleterre est venue assez vite. Tous ont accepté de participer au projet.

A la conception des chansons, avais-tu une idée précise de qui tu voulais entendre sur les parties chantées ? As-tu créé les titres dans cette idée ou est-ce que le choix s’est fait en dernier lieu ? J’ai d’abord composé les titres. Il m’est arrivé, ce fût notamment le cas avec Omar, qu’un artiste me dise “Je veux faire partie de ton projet”, alors que je n’avais pas de titre pour lui. Ne l’imaginant pas sur ce que j’avais déjà, j’ai composé quelque chose sur mesure (ndlr, la chanson “Over the Sun”).

As-tu cherché à t’imprégner et à te caler sur l’univers des artistes ? Pas vraiment, je préférais que ce soit la personne qui soit cadrée sur la musique et non l’inverse. Je n’ai pas cherché à m’adapter aux univers de chacun pour la simple et bonne raison que je voulais un album cohérent, avec sa propre patte.

Est-ce que le titre de ton album, Dilouya’s Faithful Circus, est un clin d’oeil à cette réunion d’artistes ? Etait-ce pour insister sur l’aspect collaboratif du projet ? En quelque sorte, oui. Dilouya est mon nom de famille, je m’appelle Romain Dilouya. Faithful est la traduction anglaise de mon deuxième prénom, Fidèle, et Circus renvoie au fait que chacun est venu faire son numéro. J’en ai fait part aux différents artistes du projet, à quelques potes, et tout le monde a adhéré.

Ton album est orné d’un très joli visuel représentant un homme à tête de pissenlit… Peux-tu nous en dire plus ? J’avais quelques pistes de visuels pour le disque. Le graphiste qui en est à l’origine s’appelle Jimmy Turrell, c’est le frère de John Turrell, et il est plutôt renommé en Angleterre. Il a fait des illustrations pour le Guardian (ndlr, quotidien britannique), il a fait toute la communication visuelle du Festival de Glastonbury, toute la décoration du nouvel aéroport de San Diego, aux USA. J’étais donc chez lui, à Londres, à regarder des recueils d’oeuvres et je suis tombé sur ce personnage à tête de pissenlit que j’adore ! Jimmy m’a proposé de le prendre, il m’a dit “Vas-y, ça te ressemble !”, John était du même avis. L’idée a fait son chemin et on l’a gardée. En plus, avec un projet multi-artistes comme celui-ci, il me fallait une image centrale.

Est-ce une représentation de toi ? Oui, on peut dire que c’est une idée de ce que je suis, une idée du mec qui a fait le disque et de ce qu’on y a fait passer.

On y retrouve une chanson sur le thème du pissenlit, “Dandelion’s Theme”. Est-ce une déclinaison du visuel ? Un peu oui. Je voulais un instrumental sur le disque. Le thème m’est venu, j’ai essayé de le retravailler, d’y ajouter des voix mais ça n’a pas fonctionné, donc j’en ai fait un instrumental. L’album étant chargé, sans aucune interlude, ça permet de marquer une petite pause. Souvent, sur les albums de Soul et R&B, il y a tellement d’interludes que ça en devient presque chiant (rires) ! J’ai préféré tout centrer sur les chansons, montrer notre force d’écriture. Notre créativité, elle est là, on ne va pas se prendre la tête à faire des mises en scène et des machins (rires).

Ton album a une dimension très nostalgique (son, visuels), est-ce que c’est son fil rouge, son essence ? Il n’y a pas de vraie thématique. Quelque part, c’est un album concept parce que c’est assez inédit de faire un album de ce genre là, dans ce genre là, en France. On a fait un album concept comme aurait pu le faire un artiste comme Quincy Jones, je ne me compare pas à lui bien sur (rires), ou quelqu’un comme Mark Ronson. Par contre, c’est vrai qu’une certaine humeur s’en dégage. Même sur les morceaux plus dansants, il y a de la mélancolie, mais ce n’est pas triste pour autant. C’est plutôt une atmosphère un peu rêveuse qui colle avec le personnage. “Time’s Gone” avec Coltman, “Runnin Away” avec Sly sont aériens. Le titre avec Sandra l’est un peu lui aussi. On y découvre deux personnes qui racontent leur expérience de la ville et qui se manquent.

Quel est ton morceau préféré sur l’album ? Je trouve que “The Truth” est la meilleure compo. On l’a enregistré en 5 jours dans une cave avec John, et je peux te dire que c’était rock’n roll (rires) ! J’aurais peut-être refait certaines choses avec le recul mais j’ai une tendresse particulière pour ce morceau. Il ne s’est jamais fatigué à mon oreille. J’aime aussi “Runnin Away” parce qu’il représente un instant. On l’a fait en une fois, sans se mettre d’accord, et ça a donné quelque chose de magique ! En plus, il est joué dans le monde entier. Les titres avec N’Dea Davenport et Omar sont aussi joués partout. C’est assez fou ce qu’il se passe depuis 15 jours ! Plus à l’étranger qu’en France d’ailleurs…

On ressent énormément tes influences Soul sur l’album. Etait-ce important pour toi que cela transparaisse autant sur ton premier disque ? Disons que sur cet album, je me suis vraiment fait plaisir. Je n’écoute plus autant de Soul qu’avant mais il y a ces disques tellement impressionnants, ces chefs d’oeuvres complètement fous ! Avec cet album, j’ai voulu faire la musique que j’aurais potentiellement écoutée, sans en reproduire les codes, j’ai vraiment fait des mélanges. C’est possible qu’il y ait un feeling à la Marvin Gaye (ndlr, référence à un échange en off où je lui dis que “Runnin Away” me rappelle What’s Going On) mais il peut aussi y avoir un feeling à la Elton John. Je n’avais pas cette idée de reprendre la nomenclature exacte d’un style musical. Depuis toujours, que ce soit dans le Rock, le Disco ou le pseudo-R&B français, on est dans la reproduction de codes. Matt Pokora, par exemple, fait exactement le même truc qu’Usher. Johnny Hallyday calquait Elvis, Sheila a carrément enregistré avec Chic. Et ça fait un demi-siècle que ça dure ! Les années Yé-yé, c’était ça, la scène R&B d’il y a quelques années, c’était ça. Ils étaient sappés comme des américains et allaient tourner leurs clips à Fontainebleau, c’était complètement ridicule (rires). J’ai vraiment essayé d’éviter ça. “The Truth” est un vrai morceau de Blues mais ça aurait pu être un morceau de Rock, de Funk, c’est le même tempo. Il y a 4 atmosphères sur ce titre : le couplet, le pont, le refrain, un autre pont, puis une fin à la Beatles, je me suis vraiment lâché !

Et justement, quel est ton avis sur la scène Soul/R&B française ? Pourquoi elle ne décolle pas, selon toi ? Est-ce qu’il y a vraiment une scène Soul en France, c’est un peu ça la question… Si tu parles de Sly Johnson, Sandra Nkaké, China, Ben L’Oncle Soul… Oui, mais alors on parle peut être plus d’une scène parisienne parce que très peu sortent leur disque à l’échelle nationale, et ce sont plutôt les rapports qu’ont les radios et les médias avec cette scène qu’il faut critiquer. Ca se débloque petit à petit mais pas assez pour être au niveau de l’Angleterre, de l’Allemagne ou même de la Belgique. La survie de cette scène, sa pérennité et l’exposition des talents qui en émanent seront fonction de l’évolution de l’indépendance de ce milieu et de comment les médias le développeront. On n’est pas à l’abri qu’il y ait, dans 10 ans, des radios et webradios diffusant de la Soul, qui deviennent très populaires et trouvent des canaux de distribution encore inconnus comme c’est en train de se faire en Angleterre. Je suis joué là-bas sur une webradio qui cartonne ! Les mecs font plus d’un million de téléchargements de podcasts, par émission. C’est un entrepreneur qui l’a montée et actuellement, il est en négociation avec de grandes majors anglaises pour rentrer dans leur capital et diffuser leur catalogue. La scène Soul et les autres scènes indé de ce type vont dépendre du business en France. Et ça serait vraiment génial que ça se produise. C’est un peu formel et pas très romantique pour un mec qui fait de la musique de dire ça (rires), mais je pense vraiment que c’est ça.

Et toi, comment tu définirais ta musique ?J’ai fait un disque que je ne considère pas comme un album de Soul… La Soul est devenu le terme générique et cette scène étant peu représentée, on veut à tout prix qu’il y ait des artistes qui portent l’étendard pour permettre la mise en lumière de tous les autres. J’ai bossé avec des gens comme Sly, Sandra, j’ai fait un morceau plutôt Soul avec Hugh Coltman, pourtant catalogué comme un chanteur Pop/Folk en France, donc je ne vois pas les choses ainsi. Mes chansons sont… Pop. Elles sont en tout cas construites comme tel. Et puis j’idolâtre des gens très populaires, comme une groupie (rires). Je suis fan de Michael Jackson. Plus petit, j’adorais Stevie Wonder, Paul McCartney, James Brown, John Lennon ou Jamiroquaï. Ce sont des trucs ultra populaires, et je ne dis pas cela par snobisme, je suis simplement un mec du public. Donc, j’ai du mal à me dire que je fais partie de telle scène Soul, d’autant que je ne suis pas certain de continuer dans cette voie même s’il y aura toujours cette racine.

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Est-ce que tu prévois de tourner un clip ?J’aimerais clipper “Runnin Away” ! Au départ, on souhaitait faire une animation et donner vie à ce personnage à tête de pissenlit mais ça demande énormément de budget et c’est un long travail, donc on a abandonné l’idée. Mais on va essayer de filmer quelque chose, on a deux-trois idées.

Quand on est musicien ou producteur, comment on “existe” sur une scène dominée par les chanteurs ? Et bien, on existe plus difficilement car ce n’est pas culturel en France. Ca fonctionne ailleurs, en Angleterre, aux Etats unis où c’est bien plus ancré dans les moeurs, mais ici, on a la culture du chanteur, c’est ce qu’on met en tête de gondole. Pourquoi je ne sais pas, peut être qu’on a une culture musicale moins poussée et plus tournée vers le texte, avec des artistes comme Brassens, Brel… Paradoxalement, on reste un pays où le Jazz est arrivé en masse, il y a 60 ans, mais on garde cette vision peut-être un peu ringarde de la musique… Je suis un peu dur dans mes propos depuis tout à l’heure nan (rires) ?

(rires) Bof, on est bien conscient de tout cela… Quels sont les musiciens et producteurs qui t’inspirent ? J’ai écouté beaucoup de Soul et de Jazz/Fusion des 60’s et 70’s : Roy Ayers, Donald Byrd, Miles Davis, Herbie Hancock, Quincy Jones. Je ne suis pas un puriste dans l’âme, j’aime bien les musiques mélangées. Plus récemment, j’ai beaucoup aimé James Blake et Broken Bells, le groupe de Danger Mouse. J’aime aussi le son Pop de maintenant, la scène Acid-Jazz des années 90, j’écoute un peu de musique Electro et du Hip-Hop, qui est aussi une forme de musique électronique (même façon de faire, le même type de machines, etc).

Comment tu t’es retrouvé dans la musique ? J’avais envie d’en faire sans savoir quelle forme ça allait prendre. J’ai commencé très tôt à jouer de différents instruments, batterie et piano notamment. A l’adolescence, j’ai commencé à faire des arrangements avec un double cassette. Mon père, qui faisait un peu de musique, est parti vivre au Brésil avant ma naissance. Il est revenu avec plein de percus, de disques brésiliens et de Soul. J’ai grandi avec ça et avec Michael Jackson qui cartonnait ! J’ai des souvenirs vifs de ces années là qui m’influencent encore beaucoup aujourd’hui.

Aux Etats-Unis, c’est fréquent de voir un artiste enregistrer tout un album avec un autre artiste. Je pense à Burt Bacharach avec Ron Isley, Elvis Costello. DJ Jazzy Jeff ou 9th Wonder, dans le Hip-Hop. Est-ce que toi aussi t’aimerais faire un projet de ce type, en tandem avec un autre artiste, ou concevoir tout un album pour un interprète ?Oui ! Je vais certainement réduire le nombre de chanteurs sur le prochain disque. La moitié des titres est composée, et j’ai vraiment envie de me mettre dans cette ambiance laboratoire avec un ou deux artistes seulement. Peut être Sly, peut être John Turrell, pourquoi pas les 2 ? Ca sera sans doute plus énergique, plus Pop et plus électronique, avec toujours ce fond de Soul parce que c’est dans mes gênes et que c’est quelque chose que j’aime, tout simplement. Mais oui, je réfléchis à quelque chose de plus direct avec moins d’arrangements et de grandiloquence. J’ai vraiment envie de capter un moment précis.

Est-ce que tu prévois une tournée avec tous les artistes présents sur l’album ? On va essayer de faire une grosse date à Paris avec tout le monde et ensuite, on fera quelques dates en formation réduite, avec seulement 3 leads vocaux, Sly Johnson, John Turell et peut-être N’Dea Davenport qui est partante, qui se relaieront pendant le concert à la manière du groupe anglais Incognito.

Pour terminer, je te propose d’établir ton “Portrait Chinois”… Si tu étais :- une chanson ? Pas évident de répondre parce que j’ai peut-être 9000 disques chez moi (rires), mais je dirais “Half the Man” de Jamiroquai. – un album ? Je vais t’en citer trois : Innervision de Stevie Wonder, Return Of the Space Cowboy de Jamiroquai, Chaos & Creation In the Backyard de Paul McCartney.– un chanteur ? Michael Jackson.– un instrument de musique ? Le clavinet ! Tu vois “Superstition” ? Il s’agit d’un clavier électrique avec, à l’intérieur, des cordes de guitare électriques pincées, au lieu des cordes frappées par un marteau sur un piano classique.

Merci pour cette interview Dilouya !

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