Il y a 2 ans, nous faisions l’interview de Monsieur Nov, une figure montante de la scène Soul / R&B française. Entre temps, 2 albums et de nombreuses scènes et vidéos clips ont suivi et lui ont permis de devenir un “Phénomène” qui vit la “Fast Life”.
A Lyon pour un showcase à l’Obama Club, le concert et l’after show terminés aux alentours de 5h30, c’est tout juste 5h plus tard que nous retrouvons Nov, à son hôtel afin de parler de son actualité, de ses projets, notamment la sortie prochaine du Nov 3.0 volume 2, mais aussi musique, chiffons et torchons, toujours dans une ambiance détendue et un peu “sans dessus de soul”.
Salut Nov ! Comment va le chinois moins chauve ? Les cheveux poussent depuis la dernière fois ! Ça va très bien, ça va faire 2 ans qu’on ne s’est pas vus ? Pour les cheveux, on vit avec son temps, mais il se peut que je me re-rase ! (Rires)
Quelle est ton impression sur le showcase d’hier ? C’était cool, le public était très accueillant ! Après, c’est un peu toujours la même configuration quand je sors de Paris, il y une base de fans, qui se mettent devant, qui connaissent et chantent les morceaux, d’autres plus en retrait, mais fans aussi, je les vois au fond en train de chantonner plus timidement, et enfin, tu as ceux qui ne me connaissent pas mais qui restent réceptifs et écoutent. En général, c’est très chaleureux !
Tu remontes sur Paris ou tu enchaînes une autre date ? Oui, là je remonte à Paris, je n’ai pas d’autre scène. Ce soir, c’est Joe ! Les prochaines dates sont le 15 mars, à Montpellier, et le 20 avril au Divan du Monde, à Paris.
Entrons dans le vif du sujet, ton 3ème album est sorti il y a quelques mois, 4 ans après le premier opus, ça commence à être un sacré rythme et une bonne petite carrière. Un premier bilan ? Un bilan ? Je n’en ai jamais fait, je n’y pense pas, j’en ferai plus tard (rires). A part ça, on est toujours dans la même dynamique, surtout qu’en France, depuis un an, apparaissent pas mal de nouveaux artistes Soul / R&B, il faut donc être actif : sortir des projets, des clips, faire de la scène… Sinon, on t’oublie très rapidement. C’est sûr que le rythme est soutenu, mais comme je le dis dans ma chanson, je vis la “Fast Life”, il faut assumer maintenant ! (Rires)
Le second album est souvent considéré comme celui de la confirmation, et le 3ème est encore plus attendu et sujet à pression. Quelle a été ta démarche dans son écriture ? Surtout que lors de notre dernière rencontre, tu ne te sentais pas d’enregistrer un autre album… J’ai présenté 3.0 comme un album car on l’a travaillé comme tel, on l’a enregistré en studio, on a payé les mix, les clips, etc… Mais dans la démarche artistique, ça n’en est pas vraiment un, je ne dirais pas que c’est une mixtape, on va dire que c’est un album alternatif. C’est aussi pour cela que je le sors en plusieurs volumes. Cela dit, contrairement à Groove Therapy, qui est mon vrai album et sur lequel il y a eu toute une réflexion dans la conception et les thématiques, les volumes de 3.0 ont été faits dans la spontanéité, un peu comme Sans Dessus de Soul, que j’ai conçu à la hâte car j’avais 2 morceaux qui avaient bien tourné et qu’on attendait vraiment un album de ma part. Dans 3.0, j’ai fait les morceaux sans direction artistique particulière : si le son me plaisait, je le mettais, s’il ne me plaisait pas, je zappais. D’ailleurs, tu peux remarquer une sonorité un peu différente, plus actuelle, et il n’y a pas forcément de cohésion entre chaque titre.
C’est exactement le ressenti que j’ai eu à l’écoute de ce 3.0 : j’ai d’ailleurs écrit que cela ressemblait à une compilation d’unreleased qui auraient pu être des bonus tracks des 2 précédents albums… C’est ça. Ce format m’a aussi permis d’expérimenter des choses. Les gens ont besoin de caser les artistes dans des genres, et moi, je suis étiqueté Soul / R&B, mais je ne fais pas que ça et ne me considère pas comme tel. Artistiquement, je sais qui je suis, ce que je fais et où je vais, et je ne me définis pas spécialement comme un artiste Soul ou Nu Soul. J’ai bien sûr toutes ces influences en moi, mais je me sens comme un artiste tout court. Ma musique sonne aussi Hip Hop, Electro, etc. Et avec les volumes de 3.0, j’ai pu aller vers tout cela et sortir de mon cliché.
Finalement, tu as été très inspiré ! Pourtant, juste avant la sortie de Groove Therapy, tu nous confiais que tu te voyais plus taffer dans la production pour d’autres artistes… C’est toujours mon objectif mais sur le terrain, ça ne se passe pas toujours comme on le veut, du coup, il faut trouver des alternatives. De plus, en tant que producteur, j’aimerais être plus à l’aise, et pour le moment, je n’ai pas toutes les cartes en main pour cela. J’ai fait quelques sons “en sous-marin”, mais rien n’est sorti pour X raisons. J’ai surtout envie d’accompagner un artiste dans une démarche complète, sur plusieurs morceaux ou sur tout un album, et non pas faire un son, lui donner, et disparaître. C’est un long cheminement, et là, je n’ai pas forcément le temps. Actuellement, ma force, ce sont mes sons, ma voix, mes albums, et je suis donc cette direction jusqu’au moment où je n’aurai plus rien à donner et à offrir. Finalement, je suis toujours inspiré, et encore, pour les 3.0, comme dit précédemment, je le fais dans la spontanéité, j’explore des sonorités et des inspirations parallèles, je ne tire pas sur mes véritables ressources que je garde pour mon prochain “vrai” album, prévu pour 2013.
Après “Laisse-moi” et “Phénomène”, ton nouveau single est “Fast Life”, un morceau assez slow tempo, à l’opposé des textes chantés. J’ai en tête “Fast Lane”, de Royce Da 5’9” et Eminem, qui a exactement la même thématique et qui dépote bien. Pourquoi ce choix, sorte d’oxymore musical ? C’est effectivement cela, c’est pour créer le contraste. J’aime bien prendre les gens à contre-pied, c’était trop évident de chanter la “Fast Life” sur un son qui pète. Je me suis donc dit, pourquoi ne pas faire un slowjam, guitare / voix, dans lequel, au lieu de parler d’une meuf comme dans 90% des sons R&B, et toujours dans le but de m’éloigner des clichés, je traiterais un sujet plus “sérieux”, pas forcément conscient mais qui me concerne… Voilà comment est né le contrasté “Fast Life”.
Tout l’album est d’ailleurs dans cette rythmique. Personnellement, des titres un peu plus “fast” comme “BCJC” ou “Sans Dessus De Soul” m’ont manqué. Je peux comprendre, et comme je l’ai dit, 3.0 n’a pas été pensé comme un album où on se dit “il faut tel type de morceaux ou de thèmes”. J’ai donné ce que j’avais sur le moment, et apparemment, j’étais dans une période un peu calme ! (Rires)
Peut-être pour le volume 2 ? Pour quand est-il prévu ? Oui, il y en aura. Je suis sur la fin et il est normalement prévu pour courant avril (ndlr, la date est dorénavant confirmée, et le second volume sort le 2 avril 2012). Et vous serez surpris, d’ailleurs je me surprends moi-même (rires), même si j’ai essayé de rester dans l’esprit NOV tout en explorant d’autres voies. Parenthèse : on m’a souvent dit qu’on préférait Sans Dessus De Soul par rapport à 3.0, car il est plus Soul justement. Je trouve ça dommage de ne pas aimer à cause du genre, il faut écouter la musique pour la musique. Bien sûr, tu as le droit de préférer un style à un autre, mais quand il s’agit d’écouter, voire de juger, il faut aller au-delà. On me demande aussi souvent de refaire un morceau purement Soul, mais ça veut dire quoi ? Avoir une batterie, aligner une basse, une guitare à la Musiq Soulchild ou à la Glenn Lewis comme ça (ndlr, Nov “beatboxe” une rythmique). Voilà, c’est réglé. Je pourrais refaire 2, 3, 4 fois Sans Dessus De Soul mais ça serait trop simple, même si un Sans Dessus De Soul 2 aurait forcément une couleur un peu différente. 4-5 ans ce sont écoulés, j’ai évolué. Ça fera plaisir aux puristes, mais moi, je ne me serais pas éclaté, j’aurais fait ça en 10 minutes, sans avoir cherché à aller plus loin. J’essaie toujours de proposer quelque chose de nouveau.
En parlant de Musiq Soulchild et de Glenn Lewis qui ont fait leur retour l’année dernière, quels ont été tes coups de coeur musicaux en 2011 ? Ça a clairement été Miguel, il m’a vraiment surpris, je l’avais découvert sur son premier son “All I Want Is You” avec J. Cole -je dis que c’est son premier son, mais je n’en sais rien, peut-être qu’il a déjà une carrière de ouf (rires)-. Puis j’ai découvert “Sure Thing” (ndlr, NOV a d’ailleurs fait une reprise de ce morceau, en écoute sur sa chaîne Youtube), j’ai trouvé qu’il apportait quelque chose de nouveau, y compris dans son style, il est dans le futur. J’ai ensuite écouté l’album et ça a confirmé mon ressenti. Il a bousculé le R&B, il est éclectique, il peut passer d’un son Electro/R&B un peu commercial à un son plus Nu Soul, avec des influences Rock. J’ai beaucoup aimé et me suis un peu retrouvé dans sa musique. Sinon, j’ai aussi kiffé les Rick Ross, Young Money et le rap du sud bien énervé. Ils sont productifs, du coup, je n’écoute pas tout mais j’aime bien leur démarche, ils font leur truc, non pas qu’ils ne calculent personne, mais ils ont leurs objectifs et s’y tiennent.
La dernière fois, on avait un peu fouillé dans ton iPhone pour savoir ce que t’écoutais. Aujourd’hui, c’est portrait chinois ! Si tu étais…– une chanson : J’ai toujours cité la même, “How Does It Feel” de D’Angelo.– un album : J’ai l’habitude de répondre Voodoo, toujours de D’Angelo, mais pour être plus actuel et dans l’air du temps, je vais dire All I Want Is You de Miguel.– une chanteuse : Wah ! (ndlr, il réflèchit quelques instants) Il y en a plusieurs, je peux en citer quelques unes ? Il y a Kim Burrell, une chanteuse de Gospel, Jennifer Hudson, Faith Evans, etc.– un instrument de musique : intuitivement, je dirais un piano, parce que c’est l’instrument avec lequel je joue, mais j’aimerais bien être une basse, car c’est elle qui apporte tout le groove dans la musique qu’on fait. Si la basse n’est pas calée, le groove n’existe pas.
Qu’est-ce qu’on peut te souhaiter pour la suite ? Toujours la même chose : la réussite et la rigueur dans ce que je fais !
C’est tout ce qu’on te souhaite alors. Merci pour ta disponibilité, au plaisir de se revoir !